DROIT FAMILIAL

06

Les régimes matrimoniaux
et leur liquidation

Principales dispositions légales applicables :
Articles 212 et suivants, articles 1387 et suivants du Code civil.

6.1

Les régimes matrimoniaux

A / Le régime matrimonial primaire

Par le seul fait du mariage, les époux sont soumis au régime matrimonial primaire, auquel leur éventuel contrat de mariage ne peut déroger. Ces dispositions obligatoires constituent la partie commune à tous les régimes matrimoniaux, avec ou sans contrat de mariage.

Ainsi, chacun des époux perçoit seul ses revenus mais doit les affecter par priorité à sa contribution aux charges du mariage. Il peut en utiliser le surplus pour l’acquisition de biens nécessaires à l’exercice de sa profession, lesquels sont soumis à sa gestion exclusive. L’excédent est soumis aux règles du régime matrimonial secondaire des époux, qui peut être celui de la communauté ou de la séparation de biens.

Chacun des époux peut ouvrir à son nom, sans l’accord de son conjoint, tout compte de dépôt de sommes ou de titres et prendre en location un coffre-fort. Le banquier est tenu d’exécuter les instructions que lui donne celui des époux qui a ouvert le compte, de lui assurer l’accès au coffre-fort qu’il a loué et de refuser à l’autre époux toute ingérence. Le conjoint doit néanmoins être prévenu de l’ouverture d’un compte ou de la location d’un coffre auprès d’un organisme bancaire.

Un époux ne peut, sans l’accord de l’autre, ni vendre, ni donner, ni hypothéquer, ni encore louer l’immeuble qui sert au logement principal de la famille, même s’il en est seul propriétaire, mais il peut poser seul les actes d’administration (par opposition aux actes de gestion). Si l’époux dont l’accord est requis oppose un refus abusif, le tribunal de la famille peut être saisi d’un recours ( Les procédures judiciaires ). Les mêmes règles s’appliquent au mobilier garnissant la résidence conjugale.

Les dettes contractées pour les besoins du ménage ou l’éducation des enfants obligent solidairement les époux, sauf si elles se révèlent excessives par rapport aux moyens financiers du ménage.

" Le régime primaire
s’impose à tous les époux "

" Le régime légal est applicable
aux époux qui n’ont pas fait
de contrat de mariage "

b / Le régime légal de communauté

Le régime légal est fondé sur l’existence de trois patrimoines : le patrimoine propre de chaque conjoint et le patrimoine commun, qui est dissout avec le divorce ou le décès.

Après un divorce, chacun des époux peut demander l’attribution préférentielle de l’immeuble ayant servi au logement de la famille ou à l’exercice de la profession, avec les meubles meublants qui le garnissent et les biens qu’il utilise pour l’exercice de sa profession ou l’exploitation de son entreprise.

En pareille hypothèse, il est possible qu’il doive verser une soulte à son ex-époux pour équilibrer les comptes.

La même faculté existe après le décès d’un des conjoints au profit du survivant.

Il est dû une récompense par chaque époux à concurrence des sommes qu’il a prélevées sur le patrimoine commun pour acquitter une dette propre et, plus généralement, pour compenser un profit personnel qu’il aurait tiré du patrimoine commun.

De même, il est dû une récompense par le patrimoine commun à concurrence des fonds propres - ou provenant de la vente/cession d’un bien propre - qui sont entrés dans ce patrimoine et, plus généralement, pour compenser le profit que le patrimoine commun a tiré des biens propres d’un époux.

Précisons que les époux peuvent déroger au régime légal de communauté et convenir devant notaire d’étendre ou de restreindre le patrimoine commun.

c / Le régime conventionnel de la séparation de biens

Avant le mariage, les futurs époux ont la possibilité de signer devant un notaire un contrat de séparation de biens, qui aura pour effet de modifier certaines des dispositions légales.

Au cours de leur mariage, les époux peuvent également apporter toute modification qu’ils estiment utile à leur régime matrimonial, et même en changer complètement, moyennant le respect des règles et formes légales.

Le contrat de séparation de biens a généralement pour but de protéger chaque époux contre les dettes de l’autre. Mais l’hypothèse d’une faillite de l’un des époux est moins probable que celle d’un divorce.  Or, le contrat de séparation de biens génère souvent des conflits après un divorce, alors que le premier objectif d’un contrat de mariage est de les éviter.

Des différends pourront notamment surgir sur le sort à réserver à de l’argent reçu ou hérité par l’un des époux et qui aurait été investi dans la vie commune, par exemple dans l’achat d’un bien indivis.

Dans les régimes de communauté, un tel transfert de richesse donne lieu à une récompense mais dans un régime de séparation de biens, cette règle n’existe pas.

Un époux séparé de biens doit dès lors veiller, au moment d’un tel investissement, à se ménager la preuve écrite de sa créance. C’est en raison de la difficulté morale pour un époux à se procurer un tel écrit que les litiges sont fréquents.

Toutefois, depuis la réforme de 2018, les époux peuvent prévoir des clauses relatives à l’administration de la preuve entre eux quant à la propriété des biens, des créances ou des dettes.

Ils peuvent aussi ajouter une clause de participation aux acquêts dans leur contrat de mariage, ce qui permet à chaque époux marié sous le régime de la séparation des biens de bénéficier, lors de la dissolution du régime matrimonial, de la différence entre le patrimoine originaire et le patrimoine final.

Lorsque les époux sont séparés de biens, chacun d’eux a tous pouvoirs de gestion de son patrimoine propre, contenant ses revenus et ses économies. Cependant, il ne peut disposer librement de l’immeuble qui serait affecté à la résidence familiale, ni des meubles garnissant cette résidence.

Des époux séparés de biens peuvent à tout moment demander le partage des biens indivis entre eux, sauf s’il s’agit d’un immeuble affecté à la résidence conjugale, ou des meubles garnissant cette résidence.

6.2

LA LIQUIDATION-PARTAGE

" Le divorce entraine
la liquidation-partage
du régime matrimonial
des ex-époux "

Le divorce, de même que la séparation de corps et de biens ( La séparation et Le divorce ), entraînent la liquidation du régime matrimonial des ex-époux et le partage de l’indivision (en régime de séparation de biens) ou de l’indivision post-communautaire (en régime de communauté).

La communauté ou l’indivision peut être partagée à l’amiable mais l’intervention d’un notaire est nécessaire s’il est question d’au moins un immeuble.

Si les parties ne s’entendent pas, il y a lieu de demander au tribunal de la famille d’ordonner la liquidation du régime matrimonial et la désignation d’un notaire pour y procéder (ou, dans certains cas exceptionnels, de deux notaires) ( Les procédures judiciaires ).

Si la demande n’a pas été formée dans le contexte du divorce, elle peut être formulée ultérieurement devant le tribunal de la famille.

A / L’ouverture des opérations et l’inventaire

Habituellement, le notaire réunit les parties et leurs avocats pour une réunion exploratoire informelle, qui permet de cerner les difficultés et de tenter de s’entendre sur les opérations à entreprendre, par exemple sur la mise en oeuvre d’une expertise qui n’aurait pas déjà été ordonnée par le tribunal.

La procédure à proprement parler commence par la signature du procès-verbal d’ouverture des opérations, dans lequel le notaire prend acte de tous les éléments nécessaires pour procéder à la liquidation du régime matrimonial (date de la demande en divorce, régime matrimonial, biens à partager, etc…).

Le notaire recueille également les observations des parties.

D’ordinaire, les ex-époux disposent d’un délai pour compléter le dossier, faire connaître leurs revendications et fournir tous les autres éléments nécessaires à la liquidation. Il peut donc y avoir plusieurs séances pour l’ouverture des opérations.

Le notaire liquidateur procède à l’inventaire sauf si toutes les parties y renoncent, en indiquant conjointement quels sont les biens dépendant de la masse à partager.

Il devient rare de procéder à un inventaire dans le contexte de la liquidation du régime matrimonial, sans doute en raison du caractère intrusif et coûteux de l’opération.

Cette renonciation intervient au plus tard lors de la clôture du procès-verbal d’ouverture des opérations. Le notaire liquidateur en dresse procès-verbal et acte l’accord des parties quant aux biens (et dettes) à partager.

Il est fréquent que les ex-époux conviennent dès l’ouverture des opérations de faire expertiser certains biens, de manière à faciliter le partage et l’établissement des comptes à intervenir entre eux.

b / Les opérations de liquidation

Le principe est le partage en nature. Mais un tel partage n’est pas toujours possible. Les parties peuvent vendre les immeubles de gré à gré mais, en cas de conflit, le notaire procédera à la vente publique.

Rappelons que chacun des époux peut demander l’attribution préférentielle de l’immeuble commun ou indivis servant au logement de la famille et de l’immeuble servant à l’exercice de la profession et éviter ainsi la vente à un tiers, pour autant qu’il puisse payer la soulte éventuelle.

" La procédure de partage judiciaire comporte plusieurs étapes
et le rôle de l’avocat est essentiel,
aux côtés du notaire liquidateur "

c / L’état liquidatif

Le notaire établit la masse à liquider, dresse les comptes et le projet du partage.

Ce projet liquidatif rencontre toutes les revendications des parties. Le notaire prend en compte ce qui lui paraît légitime, justifié et rejette le reste.

Les parties peuvent marquer accord sur l’état liquidatif, ce qui met un terme à la procédure.

Dans le cas contraire, les ex-époux exposent leurs arguments concernant les points de contestation : c’est ce qu’on appelle les contredits. Les parties sont liées par les contredits qu’elles formulent et ne pourront en principe plus formuler d’autres contestations par la suite.

Le notaire donne ensuite son avis et le dossier est renvoyé au tribunal, qui tranchera les différentes contestations, avec possibilité de recours (appel ou cassation) ( Les procédures judiciaires ).

d / Le procès-verbal intermédiaire

Avant la rédaction de l’état liquidatif, une difficulté peut surgir et bloquer la mission du notaire, par exemple une contestation sur l’interprétation des clauses du contrat de mariage.

En pareille hypothèse, le notaire acte le point de désaccord dans un procès-verbal intermédiaire.

Le dossier est alors renvoyé devant le tribunal, qui prendra position de manière à permettre au notaire de poursuivre sa mission.

Lorsque la cause est ainsi renvoyée devant le tribunal, les parties ont la possibilité de faire valoir leurs arguments sous forme de conclusions ( Les procédures judiciaires ).

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